Au matin, une lune apparut dans le ciel,

elle descendit du ciel et jeta sur moi un regard:

comme un faucon qui saisit un oiseau lors de la chasse,

cette lune me ravit et m’emporta en haut des cieux.

Quand je me regardai moi-même, je ne me vis plus,

car dans cette lune mon corps, par grâce, était devenu pareil à l’âme…




Rûmi



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Douze magiciens dansaient une ronde sous la grosse cloche de Saint-Jean.

Ils évoquèrent l’orage l’un après l’autre, et du fond de mon lit je comptai avec épouvante douze voix qui traversèrent processionnellement les ténèbres…..



Aloysius BERTRAND



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Rêve d’un papillon hivernal.

Une goutte de neige fondue



Dans le Karakoram.



Kakio Tomizawa (1902 ~ 1962)



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Je te l’ai dit pour les nuages

Je te l’ai dit pour l’arbre de la mer

Pour chaque vague pour les oiseaux dans les feuilles

Pour les cailloux du bruit

Pour les mains familières

Pour l’oeil qui devient visage ou paysage

Et le sommeil lui rend le ciel de sa couleur

Pour toute la nuit bue

Pour la grille des routes

Pour la fenêtre ouverte pour un front découvert

Je te l’ai dit pour tes pensées pour tes paroles

Toute caresse toute confiance se survivent.



Paul Eluard



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Devenir

24/02/08



Du temple de feu

Emerge tourmentée la vie

Un arbre




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Sillons

23/02/08



Le grave laboureur fait ses sillons et règle

La page où s’écrira le poème des blés…




Victor Hugo



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Gouttes

22/02/08



Au jour de chrysanthème

Je secoue et peigne mes cheveux mouillés



Des gouttes se laissent tomber.



Hisajo Sugita (1890 ~ 1946)



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Vibrations

22/02/08



L’espace a fait bourdonner

Les ailes fines de la libellule.



Sekitei Hara (1889 ~ 1951)



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Larmes

21/02/08



Le printemps passe.

Les oiseaux crient



Les yeux des poissons portent des larmes.



Basho Matsuo (1644 ~ 1694)



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Le grand vapeur du vent approche.

Il vient du fond de l’univers,

Comme ça.



Il transporte toutes sortes de guérisseurs mystiques,

Et les docteurs et les fées

Des villes étranges de l’espace.

De puissants guérisseurs approchent…



Chant vaudou







Détails de "La Crucifixion" – 1350

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Quand sur notre terre où se joue

Le blanc flocon flottant sans bruit

La mort, spectre vierge, secoue

Ses ailes pâles dans la nuit.



Quand nous glaçant jusqu’aux vertèbres,

Nous jetant la neige en rêvant,

Ce sombre cygne des ténèbres

Laisse tomber sa plume au vent…




Victor Hugo

in " Les Contemplations ".



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Fusion

17/02/08



Le Lakota était empli de compassion et d’amour pour la nature. Il aimait la terre et toutes les choses de la terre, et son attachement grandissait avec l’âge. Les vieillards étaient – littéralement – épris du sol et ne s’asseyaient ni ne se reposaient à même la terre sans le sentiment de s’approcher des forces maternelles. La terre était douce sous la peau et ils aimaient à ôter leurs mocassins et à marcher pieds nus sur la terre sacrée. Leurs tipis s’élevaient sur cette terre dont leurs autels étaient faits.

L’oiseau qui volait dans les airs venait s’y reposer et la terre portait, sans défaillance, tout ce qui vivait et poussait. Le sol apaisait, fortifiait, lavait et guérissait.

C’est pourquoi les vieux Indiens se tenaient à même le sol plutôt que de rester séparés des forces de la vie. S’asseoir ou s’allonger ainsi leur permettait de penser plus profondément, de sentir plus vivement; ils contemplaient alors avec une plus grande clarté les mystères de la vie et ils se sentaient plus proches de toutes les forces vivantes qui les entouraient.




Luther Standing Bear

In " Pieds nus sur la Terre sacrée "





Last Horse

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Le feu

16/02/08



Le feu brûle les herbes

Et vient nous lécher.

Un enfant le relèche.



Koi Nagata (1900 ~ 1997)



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Obsidienne

15/02/08



Quel beau spectacle mais quel beau spectacle

A proscrire. Sa visibilité parfaite

Me rendrait aveugle.



Des chrysalides de mes yeux

Naîtra mon sosie ténébreux

Parlant à contre-jour soupçonnant devinant

Il comble le réel

Et je soumets le monde dans un miroir noir

Et j’imagine ma puissance

Il fallait n’avoir rien commencé rien fini

J’efface mon image je souffle ses halos

Toutes les illusions de la mémoire

Tous les rapports ardents du silence et des rêves

Tous les chemins vivants tous les hasards sensibles

Je suis au coeur du temps et je cerne l’espace.




Paul Eluard

in " Défense de savoir "



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Analogie

14/02/08



Que deux termes forment seuls une belle composition, cela n’est pas possible sans un troisième. Car il faut qu’entre eux il y ait un lien qui les rapproche tous les deux. Or, de toutes les liaisons, la plus belle est celle qui se donne à elle-même et aux termes qu’elle unit l’unité la plus complète. Et celà, c’est la proportion, l’analogie qui, naturellement, la réalise de la façon la plus belle.




Platon



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Il faut qu’en nous s’accomplissent spirituellement les rites dont ces murailles ont été l’objet matériellement. Ce que les évêques ont fait dans cet édifice, c’est ce que Jésus-Christ, le Pontife des biens futurs, opère chaque jour en nous de façon invisible… Nous entrerons dans la maison que la main de l’homme n’a pas élevée, dans l’éternelle demeure des cieux. Elle se bâtit avec des pierres vivantes, qui sont les anges et les hommes.




Saint Bernard



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Mon verre est plein d’un vin trembleur comme une flamme

Ecoutez la chanson lente d’un batelier

Qui raconte avoir vu sous la lune sept femmes

Tordre leurs cheveux verts et longs jusqu’à leurs pieds



Debout chantez plus haut en dansant une ronde

Que je n’entende plus le chant du batelier

Et mettez près de moi toutes les filles blondes

Au regard immobile aux nattes repliées



Le Rhin le Rhin est ivre où les vignes se mirent

Tout l’or des nuits tombe en tremblant s’y refléter

La voix chante toujurs à en râle-mourir

Ces fées aux cheveux verts qui incantent l’été



Mon verre s’est brisé comme un éclat de rire.




Apollinaire

in " Alcools " -Rhénanes.



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Limites

12/02/08



« Dieu n?est pas la limite de l?homme, mais la limite de l?homme est divine. Autrement dit, l?homme est divin dans l?expérience de ses limites. »




Georges Bataille

in " Le coupable "



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Par le symbole, les mondes communiquent entre eux. Il nous permet de passer d’un plan à l’autre, en constatant que la même unité règne partout et toujours. A sa naissance, l’homme reçoit les semences de toutes les vies possibles. A lui de choisir celle qu’il développera en lui. Il peut demeurer un végétal, un animal; il peut rester l’homme nu prisonnier des feuillages, comme on le voit sur de nombreux chapiteaux.

Mais ce n’est pas là sa véritable vocation. Comme le souhaitait le Moyen Age, l’homme se doit de faire disparaître l’écran opaque qui le sépare de la lumière divine. S’il le désire, il a la possibilité de devenir transparent, de ne plus croire à l’existence d’un monde matériel qui constituerait une barrière infranchissable entre le visible et l’invisible. C’est notre manière de voir les choses qui constitue cette barrière; en entrant dans la cathédrale, en nous plaçant au centre de nous-mêmes, nous nous mettons en accord avec quelque chose qui nous dépasse. Nous avons le sentiment juste de franchir une frontière, de devenir authentique.

L’homme qui, sur un chapiteau de Vezelay, tient devant lui un globe transparent qui lui permet de contempler le dangereux basilic sans danger, a atteint la transparence indispensable pour voir toutes choses telles qu’elles sont. Cet état spirituel correspond à ce que de nombreuses traditions nomment la simplicité, qui n’est pas à confondre avec une quelconque naïveté. L’homme simple est celui qui a réalisé l’unité avec lui-même et avec le monde extérieur. IL est"simple en esprit", "pauvre en esprit", parce que son désir de percevoir la Sagesse lui donne la possibilité de la découvrir en toutes choses.




Christian Jacq

in " Le message des constructeurs de cathédrales "



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La création poétique est d?abord une violence faite au langage. Son premier acte est de déraciner les mots. Le poète les soustrait à leurs connexions et à leurs emplois habituels.




Octavio Paz

in " L?Arc et la Lyre "



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Bleu

08/02/08



La lumière bleue est ma lumière, et la lumière blanche, celle de la Mère. Lorsque la conscience supérieure universalisée commence à descendre dans l’âdhâra, il est tout à fait naturel de voir cette lumière bleue.

C’est la conscience supérieure au-delà du mental, la conscience d’où viennent la paix, la force, la lumière, etc…

Le lotus blanc est la conscience de la Mère, le lotus rouge, ma conscience où brille toujours la lumière de la Connaissance et de la Vérité.

Le bleu est la couleur du mental supérieur. Le lotus bleu l’éclosion de ce mental supérieur dans votre conscience.




Sri Aurobindo

in " Lettres bengalies "



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Petite

07/02/08



A moitié petite,

La petite

Montée sur un banc.



Paul Eluard

in " Pour vivre ici "- onze haï-kaïs (1920)



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L’assommoir

05/02/08



Dans mon tableau de Café de nuit, j?ai cherché à exprimer que le café est un endroit où l?on peut se ruiner, devenir fou, commettre des crimes. Enfin j?ai cherché par des contrastes de rose tendre et de rouge sang et lie-de-vin, de doux vert Louis XV, et Véronèse, contrastant avec les verts-jaunes et les verts-blancs durs, tout cela dans une atmosphère de fournaise infernale, de soufre pâle, à exprimer comme la puissance des ténèbres d?un assommoir.

Et toutefois sous une apparence de gaieté japonaise et la bonhomie du Tartarin?



Van Gogh

in " Lettre du 8 septembre 1888 "





Détail du tableau "Café de nuit"

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Scission

04/02/08





Un bougeoir sur une chaise, un fauteuil de paille verte tressée,

Un livre sur le fauteuil,

Et voilà le drame éclairé.

Qui va entrer ?

Sera-ce Gauguin ou un autre fantôme ?

Le bougeoir allumé sur le fauteuil de paille indique, paraît-il, la ligne de démarcation lumineuse qui sépare les deux individualités antagonistes de Van Gogh et de Gauguin.

L?objet esthétique de leur dispute n?offrirait, si on le racontait, pas grand intérêt peut-être, mais il devait indiquer entre les deux natures de Van Gogh et de Gauguin une scission humaine de fond.

Je crois que Gauguin pensait que l?artiste doit rechercher le symbole, le mythe, agrandir les choses de la vie jusqu?au mythe,

alors que Van Gogh pensait qu?il faut savoir déduire le mythe des choses les plus terre-à-terre de la vie.

En quoi je pense, moi, qu?il avait foutrement raison.

Car la réalité est terriblement supérieure à toute histoire, à toute fable, à toute divinité, à toute surréalité.

Il suffit d?avoir le génie de savoir l?interpréter.

Ce qu?aucun peintre avant le pauvre Van Gogh n?avait fait,

ce qu?aucun peintre ne fera plus après lui,

car je crois que cette fois-ci,

aujourd?hui même,

maintenant,

en ce mois de février 1947,

c?est la réalité même,

le mythe de la réalité même, la réalité mythique elle-même, qui est en train de s?incorporer.

Ainsi, nul depuis Van Gogh n?aura su remuer la grande cymbale, le timbre supra-humain, perpétuellement supra-humain suivant l?ordre refoulé duquel les objets de la vie réelle sonnent,

lorsqu?on a su avoir l?oreille assez ouverte pour comprendre la levée de leur mascaret.

C?est ainsi que la lumière du bougeoir sonne, que la lumière du bougeoir allumé sur le fauteuil de paille verte sonne comme la respiration d?un corps aimant devant le corps d?un malade endormi.

Elle sonne comme une étrange critique, un profond et surprenant jugement dont il semble bien que Van Gogh puisse nous permettre de présumer la sentence plus tard, beaucoup plus tard, au jour où la lumière violette du fauteuil de paille aura achevé de submerger le tableau.

Et on ne peut pas ne pas remarquer cette coupure de lumière lilas qui mange les barreaux du grand fauteuil torve, du vieux fauteuil écarquillé de paille verte, bien qu?on ne puisse pas tout de suite la remarquer.

Car le foyer en est comme placé ailleurs et sa source étrangement obscure, comme un secret dont le seul Van Gogh aurait, sur lui-même, gardé la clef.



Antonin Artaud

in " Van Gogh, le suicidé de la société "



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Elle est

02/02/08



Elle est — mais elle n’est qu’à minuit quand tous les oiseaux blancs ont refermé leurs ailes sur l’ignorance des ténèbres, quand la soeur de myriades de perles a caché ses deux mains dans sa chevelure morte, quand le triomphateur se plaît à sangloter, las de ses dévotions à la curiosité, mâle et brillante armure de luxure. Elle est si douce qu’elle a transformé mon coeur. J’avais peur des grandes ombres qui tissent les tapis du jeu et les toilettes, j’avais peur des contorsions du soleil le soir, des incassables branches qui purifient les fenêtres de tous les confessionnaux où des femmes endormies nous attendent.

O buste de mémoire, erreur de forme, lignes absentes, flamme éteinte dans mes yeux clos, je suis devant ta grâce comme un enfant dans l’eau, comme un bouquet dans un grand bois. Nocturne, l’univers se meut dans ta chaleur et les villes d’hiver ont des gestes de rue plus délicats que l’aubépine, plus saisissants que l’heure. La terre au loin se brise en sourires immobiles, le ciel enveloppe la vie : un nouvel astre de l’amour se lève de partout — fini, il n’y a plus de preuve de la nuit.




Paul Eluard

in " Capitale de la douleur "- Nouveaux poèmes



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Mélusine

01/02/08



Mélusine au dessous du buste se dore de tous les reflets du soleil sur le feuillage d’automne. Les serpents de ses jambes dansent en mesure au tambourin, les poissons de ses jambes plongent et leurs têtes reparaissent ailleurs comme suspendues aux paroles de ce saint qui les prêchait dans les myosotis, les oiseaux de ses jambes relèvent sur elle le filet aérien. Mélusine à demi reprise par la vie panique, Mélusine aux attaches inférieures de pierrailles ou d’herbes aquatiques ou de duvet de nid, c’est elle que j’invoque, je ne vois qu’elle qui puisse rédimer cette époque sauvage…




André Breton

in " Arcane 17 "



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