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Meta
Viendra un jour…
29/04/10
Viendra un jour je m’en irai tout seul
Dans le parfum des filets de pêche sortis de la mer,
D’une île à l’autre
Sur la trace des girouettes.
Orhan Veli
in » Va jusqu’où tu pourras «
La furtive
28/04/10
Craignez qu’elle ne s’éveille,
Plus affolée qu’un oiseau se heurtant aux meubles et aux murs.
Craignez qu’elle ne meure chez vous,
Craignez qu’elle ne s’en aille toutes vitres brisées,
Craignez qu’elle ne se cache dans un angle obscur,
Craignez de réveiller la furtive endormie.
Robert Desnos
in » Les sans-cou «
Lune
27/04/10
La lune n’offre aucune issue, c’est un visage morne
D’une blancheur d’os effroyable.
Elle traîne derrière elle l’océan comme un crime obscur ; elle est calme,
Trou béant de désespoir total. J’habite ici.
Sylvia Plath
in » La lune et le cyprès «
Tant de siècles…
25/04/10
Tant de siècles de dur labeur
aboutiront-ils enfin à la fatigue qui amollit les pierres ?
Tant de larmes, tant de sueur,
justifieront-ils le sommeil sur la digue ?
Robert Desnos
in » Les portes battantes «
Douleur
24/04/10
Il est en nous un lieu
qui ne peut être touché
où personne ne viendra
où seule la douleur
peut parler
Jean-Louis Giovannoni
in » Ce Lieu que les pierres regardent «
Il existe des mondes…
23/04/10
Il existe des mondes, vous n’avez pas idée,
Les fleurs s’ouvrent dans un grondement,
Dans un grondement sort la brume de la terre.
Orhan Veli
in » Va jusqu’où tu pourras «
Attendre dans l’invisibilité
du visible.
Savoir : tout est là dès le début,
même s’il n’a jamais été prononcé.
« Le ciel traversant les arbres »
de beaucoup de façons.
Israël Eliraz
in » Est-ce que ça bouge dedans «
Peur
21/04/10
on voudrait
heurtée l’épaisseur de l’air
cesser d’être
nageur malhabile
à pleins poumons pouvoir
expirer la peur
Benoît Conort
in » Prologue «
Parole
20/04/10
nulle parole qui
ne soit nue
même peau
la caverne est d’ombre
rêvée la paroi
muqueuse de mots
Benoît Conort
in » Prologue «
Je parle de toi…
19/04/10
Je parle de toi
et tu n’as pas n’as jamais existé
Tu réponds à mes questions
L’araignée se heurte à l’haleine des monstres
à l’aiguille des robes pressées d’en finir
Le taureau incendie l’arène
où le roi mendie son royaume
tache de sang socle de douleur
Edmond Jabès
in » Je bâtis ma demeure «
Les algues
17/04/10
Les algues nues et brillantes, vestiges d’Ys engloutie, notre utopie océane.
Les algues, chevelure de la fille du roi emportée au grand large sur son cheval
d’écume. Les algues, les algues.
Jean-Clarence Lambert
Du blanc et du noir
16/04/10
Du blanc et du noir, mais sans contraste. Du blanc sale et du noir sale, dans la
fraternité de l’abject. (…) Noirs les arbres secs ; noir le portrait des cieux dans les
rondelets liquides que fait le maigre ruisseau à mesure qu’il dégèle ; noirs les
ponts, la bouche du tunnel, les rigides trains qui avant d’entrer dedans, sont déjà
dedans, comme si quelqu’un les eût effacés après les avoir dessinés au fusain. (…)
Tout est confus, diffus, monotone, sec, froid et sale en même temps, noir et blanc,
c’est-à-dire, noir, à toute heure et sans dispersion. Quelque chose qui est, mais que
l’on n’a pas ni que l’on désire, que l’on sait n’avoir jamais désiré et que jamais l’on
ne se rappellera sinon dans l’indifférente et involontaire inattention du sommeil
difficile.
Juan Ramón Jiménez
in » Journal d’un poète jeune marié «
L’homme et la mer
15/04/10
Nous étions la mer et moi. La mer était seule et moi seul. Un des deux manquait.
Antonio Porchia
in » Voix »
Où t’enfuis-tu ?
13/04/10
Fillette
En vain ton corps se transforme
Derrière le voile et les paillettes tu disparaîtras
Et longtemps il te faudra attendre
Que fleurisse le désert
Finies les terres illimitées de l’enfance
Ici, même le brouillard ne traverse pas les barbelés.
Granaz Moussavi
in » Les rescapés de la patience «
Orpailleur
12/04/10
Orpailleur à genoux au bord de la rivière des mots, tamise pour voir !
Jean-Clarence Lambert
in » X-Alta «
Brighton West Pier
10/04/10
N’habitent
Le West Pier de Brighton
Qu’oiseaux et photographies anciennes
La passerelle métallique
S’incline
À genoux dans la mer
Le temps rabote l’arrogance
L’approche du rien nous plie à l’essentiel
Là, un squelette
Que la mer démembre
Isabelle Guigou
in » Brighton West Pier «
Nuit
08/04/10
Grand eucalyptus sous une large lune.
Une étoile tremble dans l’eau.
Ciel blanchâtre, argenté.
Pierres, pierres écorchées jusqu’en haut.
On entendit tout près les eaux basses
le deuxième, le troisième saut d’un poisson.
Extatique, vaste orphelinage – liberté.
Yannis Ritsos
in » Pierres, répétitions, grilles «
Dans l’étrange lumière ordinaire
08/04/10
Sur une autre planète, est-ce vrai
Qu’il existe des cœurs et des guerres,
Des travaux, des saisons, des palais
Quand ici le néant est parfait
Dans l’étrange lumière ordinaire.
Géo Norge
La conscience du noir
07/04/10
Peut-être la lumière est-elle seulement la conscience du noir ? Comme l’éclair
rapide, brillant, quand le câble du sommeil se rompt et nous laisse floués,
dépouillés de quoi nous ne savons pas, alors que nous voudrions juste tenir la
main promise.
Rosmarie Waldrop
in » Reluctant Gravities «
Je parle…
05/04/10
Je parle
du miroir de tes yeux secrets
toutes les sentinelles du désespoir
toutes les vrilles du versant embaumé
La rue se vide la ruée s’abîme
Je parle de qui je ne connais pas
de qui je ne connaîtrai jamais que les mots
pour toi poupées défigurées
Edmond Jabès
in » Je bâtis ma demeure «
Galets
02/04/10
…et nous roulons dans le monde
comme des galets dans la mer
comme on rêve
d’oublier
que chaque instant est du sang
que d’autres d’autres
coulent de nous
Henri Meschonnic
in » De monde en monde «
Chaînes
01/04/10
Les chaînes que je ne veux pas rompre ne sont pas des chaînes; mais elles le
seraient, si je les rompais.
Antonio Porchia
in » Voix «