L’homme épelle sa fatigue


Épelle et découvre soudain


découvre d’étranges majuscules,


inespérément seules,


inespérément hautes.


Qui pèsent plus sur la langue.


Pèsent plus mais échappent


plus vite et c’est à peine


s’il peut les prononcer


[Son cœur se rassemble sur les chemins


où la mort éclate]


Roberto Juarroz

in  » Poésie Verticale « 

Posted in: Archives by admin | Comments (0)

Homme

25/01/11

Son visage derrière la vitre. Un temps gris et pluvieux. Lui marchant sur un

chemin bourbeux, tête baissée, vêtu d’un long manteau. Son silence. Sa distance.

Le fleuve qui passait en bas de la maison. Les livres qu’il collectionnait, dont les

siens, dans une bibliothèque invisible, ou peut-être aménagée dans ses propres

œuvres. Une vie quasiment inconnue, seuls quelques actes répétés : marcher le

long du fleuve, s’asseoir dans un fauteuil, rouler en voiture sur des petites routes

champêtres. L’aspect confortable de cette existence retraitée. Des livres arrivaient

par la poste. Des amis lui rendaient visite, des inconnus passaient pour se

prosterner en silence. Son écriture était renforcée année après année par cette

posture lointaine, magnétisant le lecteur dans un éloignement toujours plus

grand. Son visage derrière la vitre : le voyant, on se disait que cet homme si seul

gouvernait quelque contrée inconnue.


Laurent Margantin

in   » La Main de Sable « 

Posted in: Archives by admin | Comments (0)

La peau du monde

20/01/11

Ordre si fragile de la géométrie,
ne me prodigue plus les consolations de ton cœur de fer.
Ces jours, je vais dans les couleurs et les sons mêlés,
et je vois la nuit dans les plus vives lumières,
monde, monstrueux fantôme,
ton jour est la plus vide des nuits.
Une voix dit : ?où suis-je ? qui suis-je ??

Est-ce ma voix dans ce désert ?
La surface de chaque chose
est tendue par la nuit qui la gonfle,
- Oh ! cette nuit en voiles de soleil !
Oui, cette parole dans la bulle d’illusion,
cette parole perdue,
ce n’est jamais que la mienne.


René Daumal

in «   ? L’ennemi du jour « 

Posted in: Archives by admin | Comments (0)

Il aurait fallu savoir que c’était le dernier verre


le dernier verre en Atlantide


Mais on ne nous dit jamais rien


Comme pour la mort de dieu


Comme pour le temps qui passe


Comme pour les filles qui s’en vont


rôme Leroy

in  » Un dernier verre en Atlantide « 

Posted in: Archives by admin | Comments (0)

Il allait revenir non pas au point de départ, mais à un lieu évanoui,

tellement évanoui qu’il ne savait même plus s’il avait jamais existé.

Puis il se réveillait. Des peintures étaient accrochées aux murs,

toutes représentant soi-disant une parcelle du lieu.

Je me serais bien projeté dans celui-là, se disait-il en observant une

toile.C’était une cabane habitée mais devant laquelle des pans de tôle

avaient été jetés. Ce n’était pas l’enfance, non, c’était plus que cela.

Les réminiscences étaient alors purement fictives, il le savait

désormais. Il aurait souhaité parcourir la terre entière, conscient de

ne plus pouvoir se souvenir, de ne plus jamais être capable de

reconnaître un lieu.


Laurent Margantin

in  » La Main de Sable « 

Posted in: Archives by admin | Comments (0)

Ce ciel…

12/01/11

ce ciel
ces larmes
ô la défaite douce

la joie de vivre
est dans l’air
qui touche les yeux

nulle rétine
pour garder cela
le passant

est la trace d’une aile
toujours le vide vent
la vite vie


Bernard Noël

in  » La Moitié du geste « 

Posted in: Archives by admin | Comments (0)

 » toutes les giboulées sont chues


désormais le soir rondement


la lune monte au dessus du laurier


on entend le vent vaguement


dans l’arbre bruissant


comme lui sans mémoire  »


Henri Droguet

in  » Boucans « 

Posted in: Archives by admin | Comments (0)

La langue

03/01/11

Ni l’appelant n’appelle, ni l’appelé n’écoute c’est le vent
Qui converse avec son propre passage.
Il balance des mots dans le vent
Non pas pour dire quelque chose mais
Pour que les mots se désarticulent
Et disparaissent.

La langue est dans ses infimes parcelles
La parole est
L’effacement de la voix.

Dans l’anéantissement des lettres
Dans le vent
La langue.

Wadih Saadeh

in  » Le Texte de l’absence et autres poèmes « 

Posted in: Archives by admin | Comments (0)

Voeux

01/01/11

A notre insu, l’avenir est déjà là et nous attend, tel un grand cerf immobile et silencieux dans notre nuit intérieure.


Que l’an nouveau soit celui de vos espoirs, de vos amours et de la paix.

Gérard



Posted in: Archives by admin | Comments (0)
FireStats icon Contenu créé par FireStats