Le rêve

13/01/07

Voici ce dont je voudrais que vous vous souveniez lorsque mon souvenir sera évoqué:

Ce qui paraît en vous le plus faible et le plus désemparé est le plus fort et le plus déterminé,

N’est-ce pas votre souffle qui a dressé et fortifié votre ossature ?

Et n’est-ce pas un rêve qu’aucun de vous ne se rappelle avoir rêvé qui a bâti votre ville et tout ce qu’elle contient ?

Si vous pouviez voir les marées de ce souffle, vous ne verriez plus rien d’autre.

Et si vous pouviez entendre le murmure de ce rêve, vous n’entendriez plus d’autre son.

Mais vous ne voyez ni n’entendez, et il est bien qu’il en soit ainsi.

Le voile qui obscurcit vos yeux sera levé par les mains qui l’ont tissé,

L’argile qui emplit vos oreilles sera percée par les doigts qui l’ont pétrie.

Et vous verrez,

Et vous entendrez.

Vous ne regretterez pas toutefois d’avoir connu la cécité, ni d’avoir été sourds.

Car en ce jour vous prendrez connaissance des desseins cachés derrière toute chose,

Et vous bénirez les ténèbres comme vous béniriez la lumière.




Khalil Gibran

in "Le Prophète"



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