Beppo

09/02/12

Le chat célibataire se regarde,
blanc, sur la face claire du miroir
et ne peut savoir que cette blancheur
et ces yeux d’or qu’il n’a jamais vus
dans la maison, sont bien sa propre image.
Qui lui dira que l’autre qui l’observe
est à peine un rêve de ce miroir ?
Je me dis que ces deux chats harmonieux,
celui de verre et celui de sang chaud,
sont des simulacres que prête au temps
un éternel archétype. Plotin,
cette ombre, l’écrit, dans les Ennéades.
De quel Adam avant le paradis,
de quelle divinité insondable
sommes-nous, les hommes, un miroir brisé ?

 

Jorge Luis Borges

in  » La Proximité de la mer « 

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