ô impatience du voyage

tu cherches une couleur, une brume, un regard

où tu liras peut-être ce qui te pousse sur ces chemins,

ce visage peut-être un jour qui t’a souri dans une gare

a emporté dans la bousculade la fumée

ce qu’il savait du labour odorant

où tu allais sans but lisible un soir

dans la lumière dorée des maisons

d’argile et de paille, de vents peut-être

et l’eau d’une mare où une femme

se penchait pour puiser, drapée de noir,

figure de la nuit brodée de rouge et de jaune,

les flots boueux de l’Euphrate du fond

des millénaires venus, le grand scarabée noir

marchant seul entre les colonnes de Palmyre,

l’homme qui cherchait un coin de calme

et un peu plus d’air pour mourir en paix

au désert de tant de savoir abstrait

et le vacarme des machines à respirer

ô impatience du voyage sans rives qui croît

inexorable dans nos entrailles

solitude éternelle, voyage immobile

sans mémoire


Lorand Gaspar

in  » Derrière le dos de Dieu « 

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